Archive des chroniques "Cybernotes de Bertrand Salvas", telles que publiées dans le magazine "Entracte"
de la Chambre des notaires du Québec et autres contributions en droit des technologies de l'information.

Août 2005 >>> Espèce de vieil écolo...

L’ordinateur est un polluant en puissance, alors faites gaffe ! 

À l’époque déjà lointaine où je réchauffais les bancs d’un Cégep montréalais en essayant de ne pas trop m’endormir, je me souviens avoir un jour soulevé la curiosité tant de mon professeur que de mes compagnons d’ennui en présentant un exposé sur le recyclage des déchets domestiques. À la fin des années soixante-dix, bien peu de gens croyaient réalisable, ni même opportun, de mettre en place un tel système de cueillette sélective. Bref, mon exposé avait bien fait rire le groupe. J’y repense avec un sourire à eux à chaque fois où je dépose mon bac de récupération au coin du trottoir. « Tiens toi », comme dirait l’autre.
Notre environnement technologique n’est pas exempt de déchets. Mais à la différence des déchets traditionnels, les déchets technologiques sont plus sophistiqués et plus encombrants. Je suis certain que plusieurs d’entre vous, comme moi, trébuchent à l’occasion sur un vieil ordinateur ou une vieille imprimante qui traîne par terre dans un coin de leur bureau. Car une autre caractéristique des déchets technologiques est qu’au moment où on songe à s’en départir, notre mémoire nous ramène le montant de la facture acquittée lors de leur achat et parfois celui des paiements mensuels qui ont suivi ! Parions d’ailleurs que ce souvenir est frais à votre mémoire puisque la courte durée de vie de ces appareils, de trois à six ans en moyenne, fait en sorte qu’ils ne survivent pas tellement longtemps à leur période d’amortissement financier.
« Quel beau meuble ! Très original ! »
Alors que faire ? Convertir en table à café votre vieux Pentium ou remplir de terre votre vieille imprimante HP II recto-verso et y planter quelques fleurs n’est pas vraiment une solution attrayante. Jeter des appareils de ce genre aux ordures est tout aussi inacceptable, croyez-moi. Tout d’abord à cause de la quantité importante de matières polluantes qui les compose, par exemple des métaux lourds (plomb, du mercure, du cadmium, argent, cuivre, etc.) et ensuite, vous vous en doutez bien, parce que rien dans un ordinateur n’est biodégradable à part les noto-collants fixés à votre écran pour vous rappeler d’envoyer sa copie de testament à Mme Tartenpion ou de rapporter du lait en rentrant chez vous.
Par ailleurs, au moment de jeter votre vieux compagnon, protocole de Kyoto oblige, vous aurez aussi pensé à la somme d’énergie qui a été consommée pour le construire. La fabrication de composantes informatiques implique en effet l’utilisation de matières premières et de combustible représentant environ 10 fois le poids de l’appareil fabriqué. Deux cent quarante kilos de combustible fossile seraient notamment brûlés et envoyés dans l’atmosphère pour la fabrication d’un seul ordinateur ! En comparaison, le combustible utilisé pour construire une automobile est à peu près équivalent à son poids. Écologiques les ordinateurs?
Maman, j’ai mal au coeur
Malgré tout, au Canada seulement, près de 34 000 tonnes de matériel informatique ont été envoyées au dépotoir pendant l’année 1999 seulement, laissant dans l’environnement environ 1400 tonnes de plomb et une demi-tonne de mercure. Charmant n’est-ce pas ? C’est environ deux fois plus que le matériel informatique recyclé pendant la même année. Imaginez un peu s’il fallait faire la somme de tout le matériel désuet traînant dans les placards des bureaux de notaires1! Alors que faire de ces vieilles bécanes ?
Je vous ai déjà donné un indice, alors la réponse devrait être facile. Vous vous souvenez des trois « R » : réduire, réutiliser, recycler. L’évolution galopante de la technologie et l’accroissement des besoins qui s’ensuit rendent la réduction de notre consommation d’ordinateurs et périphériques assez utopique, je vous le concède. Restent toujours la réutilisation et le recyclage. La réutilisation peut se faire de deux façons. Tout d’abord, regardez votre entourage. Vous avez peut-être un ami, descendant, ascendant ou collatéral que vous voudriez privilégier en lui faisant cadeau de cet ordi ou de cette imprimante qui s’essoufflent à la tâche dans votre étude, mais qui peuvent très bien faire l’affaire pour des usages plus légers.
Prenez votre pilule...
Il ne faut cependant pas trop espérer réaliser un profit, ni même réduire votre coût d’acquisition en vendant trop cher vos vieux appareils, car la valeur du matériel informatique fond encore plus vite que celle de votre voiture. Et vous ne voulez surtout pas, en prime, causer une chicane de famille. Si personne dans votre entourage ne paraît intéressé, certains revendeurs de matériel usagé pourraient l’être. Encore là, ne pensez pas réaliser une transaction commerciale lucrative. Les quelques dollars que vous tirerez de l’opération symboliseront surtout votre fierté à faire votre part pour la planète et vous apporteront le soulagement de ne plus trébucher sur vos vieux équipements de production en allant faire une photocopie.
L’option du recyclage s’imposera finalement pour les appareils trop dépassés pour les revendeurs2. Des entreprises manufacturières spécialisées dans ce domaine les démonteront et se serviront des composantes recueillies pour fabriquer des appareils de deuxième génération, remis à neuf, certes moins performants que ceux du dernier cri, mais encore tout à fait utiles et abordables pour bien des entreprises, incluant votre étude. Certaines les enverront d’ailleurs dans des pays moins favorisés.3
Une petite astuce avec ça ?
Pour terminer, assurez-vous de bien effacer vos disques durs avant de vous défaire de vos vieux ordinateurs, car ils regorgent d’informations confidentielles dont se délectent les adeptes du vol d’identité et de la fraude en tous genres. À ce niveau, sachez que de simplement jeter vos documents au panier, et même reformater votre disque sont des précautions insuffisantes pour tout faire disparaître.
En effet, quand vous jetez un document à la corbeille, votre ordinateur se contentera généralement de supprimer de sa base de données les méta données qui le concernent et de détruire les informations permettant de le retrouver sur le disque. La partie de la surface du disque où les octets le composant étaient effectivement fixés magnétiquement ne sera cependant pas effacée, ce qui permettra éventuellement d’en récupérer de grandes parties à l’aide de logiciels de récupération. C’est ce qui vous permettra de faire récupérer certaines de vos données sur un ordinateur ayant subi un « crash » majeur.
En reformatant un disque dur, l’ordinateur procédera à un effacement de la surface du disque et à une réallocation de ses secteurs. Mais l’enregistrement magnétique étant très efficace, les données pourraient bien survivre à cet effacement sommaire. Mieux vaut faire appel à des logiciels spécialisés qui procéderont successivement à plusieurs enregistrements/effacements de données vides sur la surface du disque, selon divers protocoles parfois inspirés du monde militaire. Et oui... la technologie a bien évolué depuis les déchiqueteuses à papier !
Vous trouverez sur le Web une multitude de tels logiciels, tous aussi faciles à utiliser que votre explorateur de documents. Vous aurez alors toute la tranquillité d’esprit voulue pour vous amuser avec votre nouvel ordinateur, satisfait d’avoir fait votre devoir pour l’environnement.
À la prochaine !



1 Soit dit en passant, pourquoi ne pas songer à un programme de récupération pour ce matériel ?
2 Ordinateurs recyclés: un marché en pleine croissance, Michel Dumais, publié dans BRANCHEZ-VOUS! le 13 juillet 2005http://www.branchez-vous.com/actu/05-07/09-254101.html
3 Vous pouvez visiter le site de l’une de ces entreprises pour le constater par vous-même. Par exemple, Ecosys, établie dans la région de Montréal. http://www.ecosys.ca  

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